LE VRAI SANG
Publié chez P.O.L en 2011.

L’HOMME DE VAUVERDANNE.
Apportez ici le cercueil de ma tête, que je lui rechante une chanson active pour la réveiller. Voici la chanson à ma tête : « Je vous salue ma tête pleine de peurs, vous êtes bannie entre toute les flammes, dont méjusse, le pire de votre valetaille, a jailli » ; « Je vous conspue ma terre pleine de heurts, vous êtes partie entre toute les failles, et ujusse, le fruit de vot’poitrail est nourri » ; « Je vous berlue ma chair vide de pleurs, vous êtes issue entre toute vos larmes, et mujusse, sorti d’vot’soupirail, est pourri ». J’aime la pensée : ses yeux, sa cire froide, sa toison noir feu, sa parole au regard d’acier. « Notre pire qui êtes sans mieux, donnez-nous aujourd’hui notre rien pour manger davantage et achevez-nous. Pour ronger ce monde dans votre joie débordante. »
Mercredi six janvier cinq mille cinq cent septante-dix mille onze cent onze mille onze de onze, je dois maintenant, devant vous, venir mettre fin à mes jours par cette date d’aujourd’hui signée sur cette pancarte et par ce chanvre terminal qui tourne rétrograde dans le vide... Cordon, s’il vous plaît ! Néant ? avec moi ! Suites-séquelles de mes jours, venez que je vous y attacherasse pour que vous vous y pendrilliassiez, pour que vous me délaississiez !
Mercredi six janvier cinq mille cinq cent septante-dix mille onze cent onze mille onze de onze, je dois maintenant, devant vous, venir mettre fin à mes jours par cette date d’aujourd’hui signée sur cette pancarte et par ce chanvre terminal qui tourne rétrograde dans le vide... Cordon, s’il vous plaît ! Néant ? avec moi ! Suites-séquelles de mes jours, venez que je vous y attacherasse pour que vous vous y pendrilliassiez, pour que vous me délaississiez !
Le Vrai sang a été créé à l’Odéon-Théâtre de l’Europe, le 5 janvier 2011.
à lire : Théâtre/Public, n° 200, 2011

Dossier consacré au Vrai sang : fac-similé des carnets de mise en scène, photos d’Alain Fonteray, extrait et texte inédit de Valère Novarina, texte critique d’Isabelle Babin.