Écrivain, peintre, metteur en scène

L’Inquiétude de Valère Novarina

du 18 au 20 mars
L’INQUIÉTUDE de VN
par André Marcon, traduction Fernando Gomez Grande.
BOGOTÀ - COLOMBIE
Festival International
Teatro Leonardus

23 et 24 mars
L’INQUIÉTUDE de VN
par André Marcon, traduction Angela Leite Lopes.
CURITIBA - BRÉSIL
Festival de Curitiba
Teatro do Paiol

26 et 27 mars
L’INQUIÉTUDE de VN
par André Marcon, traduction Angela Leite Lopes.
RIO DE JANEIRO - BRÉSIL
Espace de la Maison de France de Rio de Janeiro

29 et 30 mars
L’INQUIÉTUDE de VN
par André Marcon, traduction Angela Leite Lopes.
SAO PAULO - BRÉSIL
SESC BELENZINHO

LE DISCOURS AUX ANIMAUX
publié chez P.O.L. en 1987, 328 p.

"Un homme parle à des animaux, c’est-à-dire à des êtres sans réponse. Il parle à trois cents yeux muets. Il prononce Le Discours aux animaux qui est une suite de onze "promenades", une navigation dans l’intérieur, c’est-à-dire d’abord dans sa langue et dans ses mots. Un homme parle à des animaux et ainsi il leur parle des choses dont on ne parle pas : de ce que nous vivons par exemple, quand nous sommes portés à nos extrêmes, écartelés, dans la plus grande obscurité et pas loin d’une lumière, sans mots et proches d’un dénouement."
Quatrième page de couverture de la première édition.

" Un jour j’ai joué de la trompe ainsi tout seul dans un bois splendide et les oiseaux vinrent se pacifier à mes pieds quand je les nommai un à un par leurs noms deux à deux : la limnote, la fuge, l’hypille, le scalaire, le ventisque, le lure, le figile, le lépandre, la galoupe, l’encret, le furiste, le tion, le narcile, l’aulique, la gymnestre, la louse, le drangle, le fugile, le ginel, le tripa, le semelique, le lipode, l’hippiandre, le plaisant, la cadmée, la fuyau, la gruge, l’étran, le plaquin, le dramet, le vocifère, le lèpse, le huseau, la grenette, la galéate, la sorme, le rintien, la treuse, l’épandrille, l’ousbie, la magre, le lorme, le litiange, l’évert, le scalet, le frille, la mulse, l’ascardille, l’oublet, le nadon, l’étrule, le frigite, le meule, l’ampoud, l’amilite, l’ectoir, le vecti, l’asebanne, le bulgat, le murse, l’appeloir, le fendriaud, l’entigue, le malbas, le marnet, le ramble, l’alieur, le vérant, le tridel, le gaspe, l’anfuse, le rangin, l’étourbe, le jumeli, l’atropase, l’iscarde, l’anvette, la ouspe, le hugret, le frille, le drilet, le merculique, le balieux, l’ondre, le vigre, le garmant, le modrel, le house, l’apartillon, le viliosse, le fouixe, l’aspireau, le moal, la fulque, la fusite, l’antrifuge, l’ormix, le lépandre, le gireur, le salsupe, l’oucarde, la membrillonne, l’ormant, le fleuge, le palistre, le louime, l’ulien. "

version pour la scène

Le Discours aux animaux a donné lieu à deux versions pour la scène.

1-L’Animal du temps, créé le 19 septembre 1986 par André Marcon, sous le titre "Le Discours aux animaux", au Théâtre des Bouffes du Nord, dans le cadre du Festival d’Automne à Paris.

2-L’Inquiétude, seconde partie du Discours aux animaux, a été créé le 12 juillet 1991, par André Marcon, dans une mise en scène de Marc Blezinger, Festival d’Avignon, Chapelle des Pénitents Blancs ; reprise au Théâtre de l’Athénée du 26 novembre au 20 décembre dans le cadre du Festival d’Automne à Paris.

PRESSE

Le Matin Le 12 novembre 1987
« Discours aux animaux », de Valère Novarina
Dieu s’est payé notre tête !
Article écrit par Gilles Costaz

Valère Novarina est sans doute plus connu au théâtre qu’en littérature, ayant été adapté et joué au festival d’Avignon et au festival d’Automne. De ces Discours aux animaux, qui viennent de paraître, l’acteur André Marcon avait emprunté de larges extraits pour un spectacle mémorable. Voici le texte complet. Délectable comme pourrait l’être du Pascal réécrit par Rabelais et corrigé par Beckett.

Le nouveau livre de Valère Novarina comprend onze Discours aux animaux, onze adresses à des bêtes qui sont sans aucun doute les humains. Mais combien de personnes profèrent ces discours ? Les narrateurs sont insaisissables, ils défilent en même temps que leurs noms, si nombreux qu’on n’a pas le temps de les arrêter au moment de leur passage sur l’écran.

Mais c’est sans importance puisque ces centaines ou ces milliers de personnes, c’est toujours le même individu, un crieur, un contempteur qui, sous prétexte de s’adresser aux animaux, s’en prend ouvertement à Dieu. D’ailleurs, à une exception près, tous ces passants se prénomment Jean : preuve que cette foule ne comprend qu’un seul homme.

Le livre, on s’en doute, n’est pas banal. Le narrateur se multiplie et c’est toujours le même. S’il n’y avait que cela, pauvre lecteur ! Mais, si Novarina n’est pas un auteur à tendre des pièges, c’est parce qu’il se passe de tout : d’une histoire, d’une intrigue, d’une forme existante, du français granimatical et académique, d’une progression. Son livre est une gigantesque répétition

Novarina passe son temps à dire la même chose. Cette chose, c’est que nous sommes sur terre sans comprendre rien à rien, que Dieu s’est payé notre tête et que nous sommes non pas à côté de nos pompes, comme on dit vulgairement (ce qui serait un moindre mal), mais à côté de nous-mêmes.

Novarina ne définit pas l’homme selon le plein, mais selon le vide. Un être humain, c’est d’abord un trou et un tube, ou deux trous, selon l’humeur de notre poète, selon, qu’il s’intéresse à un orifice évident ou aux yeux. Ne craignez pas quelque scatologie.

« NE NEGATIF ».

Le trou est une image de notre misère, une façon d’opposer le mensonge de la chair à la réalité de notre dénuement. C’est pascalien ! A peine nés, les personnages de Novarina ont déjà échoué. Ils ne sont pas même nés, d’ailleurs ; ils sont en morceaux, ils se mangent eux-mêmes, ils sont déjà des cadavres. « Je souffris d’avoir été, avant même d’être, né négatif », dît l’un d’eux. « Né négatif », voilà peut-être ce qui éclaire le mieux ses personnages fantômes, qui ne prennent de goût à la vie qu’en s’en prenant à elle ou en mettant de temps à autre de côté un désespoir foncier (« Vivre m’intéressa toujours intensément à peu près un soir sur quatre »).

Ici, le journaliste a peur d’aller plus loin ! N’a-t-il pas donné au lecteur un tableau si sombre, si repoussant que celui-ci est déjà en train de fuir et de se rabattre de toute urgence sur une gauloiserie de Boudard ou un prêt-à-penser de Christiane Collange ? Ce n’est pas le moment de lui dire que Novarina mine et massacre le langage en supprimant les négations (il écrit « pas » et non « ne pas »), en modifiant les terminaisons des participes et des verbes (« J’ai tout vivu par la parole »), en distordant pas mal de mots et en en inventant des milliers. Notre lecteur, apprenant cela, courrait traverser la mer Rouge.

GENIE
VERBAL

C’est en effet difficile de donner une idée d’un ouvrage de Novarina. Peut-être vaudrait-il mieux parler de lui, de cet écrivain né en Haute-Savoie il y a une quarantaine d’années, secret et silencieux qui traverse la vie à vélo et qui est aussi peintre. Enfermé dans une bulle, il exécuta 2 587 dessins, correspondant aux 2 587 personnages de son précédent livre, le Drame de la vie !

De ce livre, il tira un spectacle qu’il mit en scène au festival d’Avignon 1986 et à Nanterre. Il vécut longtemps comme documentaliste mais sans doute a-t-il abandonné ce métier, puisque quelques gens de théâtre l’ont fait sortir de l’anonymat : Marcel Maréchal, Christian Rist, Main Crombecque, et surtout André Marcon qui, avec des extraits du Drame de la vie, Pour Louis de Funès et Lettre aux acteurs, a libéré la charge explosive de chaque mot et suscité un cercle presque vaste d’admirateurs.

Au théâtre, l’oreille entend le génie verbal de Novarina. A la lecture, l’oeil voit la noirceur de la pensée. Que dire d’autre, alors, que Novarina est le plus grand monologuiste du monde, que, sur une lande où vjennent s’échouer quelquefois les déchets du monde moderne, il jette des imprécations à Dieu et des bouteilles vides (vides d’un amour désespéré) aux hommes-animaux, soit un fabuleux soliloque, éternellement identique et toujours renouvelé par de mini-comédies noires et de somptueuses accumulations de mots imaginaires ? Il défie la Bible et les Evangiles. Et, dans son match métaphysique et littéraire avec Dieu, il tient le choc. Peut-être même gagnera-t-il aux points.

GILLES COSTAZ

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Libération le 26 septembre 1986
Article écrit par Marion Scali

Le nouveau Novarina aux Bouffes du Nord
Pour la troisième fois, le comédien boxe un monologue signé Valère Novarina. Après « Adramélech », voici « le Discours aux animaux ». Encore plus percutant

Le Discours aux animaux est le troisième monologue de Valère Novarina qu’André Marcon met sur scène. Après l’inoubliable Monologue d’Adramelech et l’indispensable Pour Louis de Funès, c’est probablement le texte le plus « engagé » de l’auteur, celui dans lequel il met le plus de lui-même sans, cette fois, se réfugier derrière un personnage imaginaire. Le Je de ce discours-la est d’autant plus sacré aux yeux de l’acteur qui n’a plus d’intermédiaire entre l’écrivain et lui.

Novarina-Marcon s’adressent aux animaux, aux « homminaux » et la sensation du spectateur, au-delà de la prestation de l’acteur, est pour le moins ambiguë : on sait que c’est de nous qu’il s’agit, en termes plutôt rudes et inconfortables, abruptes et terrifiants et, malgré tout, lorsqu’après une digression (« Dans toute ma vie, j’avoue avoir mangé un seul corps d’homme, le mien »), Marcon invoque à nouveaux ces animaux, on est soulagé de voir qu’il revient, qu’il quitte ce lieu étrange où nous n’avions pas de place, une sorte d’éternité et de savoir extra-humain qui sont le propre de l’acteur et du je novarinien, pour revenir s’occuper de nous. La prouesse de Marcon est telle que certains spectateurs, pour se rassurer, doivent affirmer qu’il invente chaque soir des mots, qu’il improvise des boutades. D’autres refusent ces gestes, qui ne semblent ni appris ni inventés mais, comme dictés par l’écriture. « Tout le monde le voit mais personne n’ose le dire que quand il joue, l’acteur a la peau absolument transparente et qu’on voit tout ce qu’il y a dedans. » Lorsqu’André Marcon agrippe de sa main la table derrière il est assis (Louis de Funès), quand il surgit sur le plateau nu dans son lourd et grand manteau (Adramélech) ou quand aujourd’hui il baisse la tète comme un taureau blessé sur la scène ronde des Bouffes du Nord, on ne peut qu’oser le dire : André Marcon a la peau absolument transparente.

Il y a là, sur le plateau, un être aux gestes aussi simples que sacralisés sitôt faits. De quel autre ordre pourrait être ce battement d’artère sur le cou, qui semble battre la mesure des mots plus sûrement que le jeu de jambes ? Cette sueur au front, plus justement progressive que n’importe quel trucage de cinéma ?

Une fois le KO par émotion digéré, il n’y avait plus qu’à demander à l’artiste le fond de son histoire. « Pas une erreur sur le texte, à la syllabe près ; c’est ma fierté. L’écriture est tellement rythmée que si je me plante sur une phrase, tout s’écroule. il m’a fallu trois bons mois pour conquérir une sorte de virtuosité bien au-delà du par-coeur » Quant aux gestes : « Je suis dans un état d’improvisation absolue. Rien n’est fixé, ça se met à danser malgré moi. Ce sont les mots qui provoquent la bougeotte. C’est aussi confortable que de sauter 5,25 m à la perche.

André Marcon est probablement un des seuls acteurs à pouvoir, sans se nuire, se mettre seul en scène. Même s’il rend hommage à Alan Françon qui l’a aidé à s’installer sur scène, à régler les lumières, on sent bien qu’il s’agit d’une relation exclusive entre Novarina et lui : « Pour jouer un texte de Novarina, je dois l’apprendre pour le comprendre et le comprendre pour l’apprendre. » Un point c’est tout.

Et il ne s’agit aucunement de modestie lorsque Marcon proteste qu’il est sur scène « moins exposé que ne l’est Valère Novarina, qui est l’auteur et l’acteur de son propre texte ». Disons que cet auteur-Novarina a for ever un corps et une voix qui sont précisément ceux de l’acteur-André Marcon, 38 ans, un visage de boxeur et des mains de pianiste, dix-huit ans sur les planches et beau comme un Dieu.

Marion SCALI

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Libération le 10 octobre 1986
LES BOUFFES AUX ANIMAUX
Article écrit par Marion Scali

A Paris, André Marcon interprète Valère Novarina, théâtre des Bouffes du Nord, 42 39.34 50, jusqu’au 12/10.

André Marcon est encore pour quelques jours(jusqu’au 12) au théâtre des Bouffes du Nord, l’antre de Peter Brook, où l’acteur, seul en scène profère le Discours aux animaux de Valère Novarina. C’est le troisième monologue de Novarina qu’interprète Marçon, c’est le texte le plus personnel de l’auteur et une prestation sans-faute de l’acteur. Autrement dit, c’est un peu plus d’une heure de bonheur et une bonne occasion de remettre sa pendule à l’heure : le théâtre, c’est un texte et un auteur, tout simplement.

MS

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Le Monde le 17 novembre 1987
.« Le discours aux animaux »
Le jeu du risque-tout
Article écrit par Odile Quirot

Il n ’y a pas de crise d’auteurs : le langage de Valère Novarina ou celui de Michel Deutsch donnent aux acteurs autant de plaisir que celui de Claudel. Il n ’y a pas de crise d’acteurs quand ils se nourrissent de riches textes :
André Marcon, Daniel Briquet, François Chattot. Et Serge Maggiani, qui donne son étrangeté aux paroles de saint François d’Assise. Malgré le petit frère, et saint Antoine, et bientôt saint Marc (par Jean-Luc Rideau), il n ’y a pas de miracle. La pluie n ’a pas épargné le Festival.
Le spectacle Pinter, auquel le président Mitterrand était venu assister, a été annulé
Une voix pour un poème, « immensité de mots à dire " partition impossible. Une lecture lyrique d’André Marcon.

« Nettoyée " disait une dame à la sortie. Pour cela, rien de tel qu’un poème. Ou une heure de songe sur la terre encore chaude et lourde d’une nuit d’été. Peut-être était-ce dans un vaste cimetière campagnard, peuplé de pins, de chants d’oiseaux, de ceux qu’arpente André Marcon, disant à Villeneuve-lez-Avignon le Discours aux animaux.

Il entre précautionneusement dans l’arène. Ne regardant ni le public ni le bout de ses souliers blanc et marron. Chemise blanche et grand manteau, un peu lourd : il a mis l’équipage d’un voyage d’importance, mais l’homme est sans bagage.

Le sillon des mots

Il entame les mots, un peu ramassé, serré à l’intérieur. Puis, peu à peu, le rythme s’enfle et se déploie. Marcon creuse le sillon des mots. Il chante aussi sous le pin vertical du cloître de la collégiale, où une guirlande multicolore de jour de fête a allumé ses lucioles, la ritournelle cabotine d’un clown de dieu. La voix est sourde, mais, à l’intérieur, il y a des lumières. Il crie « Animaux ». et pour finir égrène des noms d’oiseaux.

A l’automne dernier, entre les murs nus des Bouffes du Nord, Marcon lançait déjà, à la face des hommes, de Dieu, qui ne lui répond pas, ce Discours aux animaux. Et l’été passé, cette fois à Avignon, il empoignait à bras-le-corps Pour Louis de Funès, un texte écrit par Novarina « pour épuiser l’acteur » « En ce qui me concerne, il y a réussi », dit-il. Mais lui, qui avoue n’avoir de dévotion ni pour le record ni pour la performance, ne peut plus se passer des partitions impossibles de Novarina.

Dans un jardin où coule une fontaine, il parle maintenant du travail « de forçat, de forcené que cette langue requiert, à qui veut la déchiffrer. Il avouera plus tard que, tous les soirs, il a peur, d’une « angoisse, à Avignon, multipliée par dix ». Pourquoi ? il ne sait pas : le plein air, le mistral...

Il se sent seul, face à cette « immensité de mots à dire ». à cet homme qui « recommence sa naissance à chaque minute. Et pose les trois bonnes questions. « Pourquoi le corps est-il » porté ? » « Pourquoi l’espace » est-il en quatre ? » « Pourquoi » le mort dit-il qu’il sort ? ».

Après la représentation ? C’est la « liesse », « une délivrance ». Jusqu’au lendemain, où tout est à recommencer.

Il tient bien droit, Marcon, en équilibre au-dessus des mots de Novarina. Son tour de piste dure un éclair. Soixante-dix minutes.
« Puck, dans le Songe d’une nuit d’été, dit qu’il faut quarante-cinq minutes pour faire le tour du monde. C’est le temps qu’a mis Gagarine. aussi ».

ODILE QUIROT.

* Le 16 juillet, 22 heures, cloître de la collégiale, chartreuse de Villeneuve­lez-Avignon. Les 21, 22 et 23 juillet à Marseille, Théâtre d’essai, chapelle des Bernardins.

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Libération le 5/6 mars 1988
Marcon, le contact et le compact
Article écrit par Marion Scali

Aux Bouffes du Nord, André Marcon reprend « le Discours aux animaux » de Valère Novarina, qu’il publie en livre compact. Une première. Jubilatoire dans les deux cas.

C’est rond et brillant ; ça en met plein les oreilles, c’est un livre. Le premier livre compact de la langue française. La voix qui dit appartient àAndré Marcon et le texte à Valére Novarina ; version pour la scène du « Discours aux animaux », que l’acteur reprend par ailleurs au théâtre de la Bastille après une grande tournée européenne — tellement grande qu’il n’a pas eu le temps de mémoriser la suite du livre et qu’à la place de la « deuxième époque » annoncée, il redonne le spec­tacle créé aux Bouffes du Nord en septembre 1986.

C’est en juillet 1987 que les jeunes éditions Tristram (en hommage à « Tristram Shandy », le livre de Lau­rence Sterne, 1759-1768), avec la collaboration du Théâtre Fartov de Bordeaux et Yvan Blanloeil pour la réalisation ont enregistré numériquement le texte dans un « lieu silencieux, en dehors de Bordeaux : le cuvier d’un grand cru de Saint-Emilion », explique le maître d’oeuvre, Jean-Hubert Gailliot. On regrette presque que l’enregistrement n’ait pas donné lieu à un film-ou à une pièce Marcon dans le noir au milieu des cuves, déclamant, seul ; acteur « avec tout le théâtre entre les dents » comme l’écrit Novarina, pendant que l’ équipe technique s’installait dans les écuries, suspendue, casques aux oreilles, a sa voix...

Le château Soutard de François de Ligneris n’a pas dû déplaire à l’artiste, qui semble très inspiré pendant les soixante-deux minutes que dure le disque, avec cette voix unique qui fait que, dès qu’on l’a entendue, on ne peut plus lire une ligne de Novarina sans y penser. « J’ai vécu pour me venger d’être »..Il y eu, dans les années soixante, Pierre Fresnay qui lisait « la Bible », vers cinq heures du matin sur Europe 1. Sa voix collait à son objet ; une voix qui prononçait les mots, les proférait, les pensait comme s’il les inventait au fur et à mesure. Celle de Marcon est de cet ordre-là, voix d’outre-verbe, comme on dit d’outre-tombe. Il n’est pas néces­saire d’avoir vu le spectacle pour rester pétrifié de jubilation à l’écoute du disque.

Les éditions Tristram (« chaque tranche de livre y est une tranche de vie »), dont c’est là le premier exploit, présentent la particularité de vouloir trouver pour chaque texte le support qui lui convient le mieux. C’est ainsi qu’ils ont en projet la publication de « la Mort du héros » de Claude Minière, un « roman en progrès » publié en traitement de texte-feuilleton et envoyé à des « abonnés à l’écriture », « avec deux vitesses, les écrits au fur et à mesure, ou la livraison de l’ensemble ». Le disque Marcon-Novarina leur a coûté 130000 F, et « mille exemplaires vendus couvriront les frais ».

MS.

« Le Discours aux animaux », au Théâtre de la Bastille, du 1er au 13 mars, 19h45 (tél. : 43.57.42.14) et en disque laser 62 minutes 45 secondes, éditions Tristram, Crissay-sur-Manse, 37220 l’Ile-Bouchard, 160 F.

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Libération le 16 juillet 1991
Robinson Marcon dans l’océan Novarina
Article écrit par Mathide La Bardonnie

L’acteur redéboule aux Penitents blancs possédes par l’« Inquiétude », suite du « Discours aux animaux » de Valères Novarina. Face à un énorme rocher, par Mark Blezinger, il enracine un monologue entamé en 1985

Chapitre I. En l’an mil neuf cent quatre-vingt-cinq, au septième mois, dans la chapelle des Pénitents blancs, il ne cessait de songer, André Marcon il venait de découvrir de ses oreilles l’île du Novarina. Il devenait Robinson, Marcon : n’avait dans sa tête employée alors à jouer les vieux soleils de Faulkner, n’avait à la bouche en vrai que les mots adressés à feu l’acteur Louis de Funès par Novarina, des mots déboulonnant, bout-en-traînant, jusqu’au-boutant. Fou de joie. de la joie de l’intérieur. Fou de jubila­tion était Marcon, et à ceux qu’il aimait il procurait une photocopie de ce premier grandiose monologue qu’il envoyait —chaque après-midi— en plein plexus solaire, droit au ventre, au précis milieu du front entre les deux yeux, à l’épicentre de la nuque. On enregistrait par tous les pores de la peau les décharges de sa lancinante récitation. Il y revenait, dans le Novarina, comme on rentre au port. Ça reprenait : le reprenait : nous reprenait. Il était là, ce massif, ce trapu, cet enraciné aux yeux alors rieurs. Il répétait : « Vous ni entendez ? » Il craignait que non : « Perroquateurs de concepts vous m’entendez ? ». Gardiens des noeuds syntaxeurs de viscères bocalisateurs de névroses démêleurs de pénis, divinateurs de membranes, coupeurs d hommes en trois. phallucinateurs, pêcheurs de méandres, écouteurs d’oreillers, vous m’entendez ? » Et quand il demandait ainsi : « Vous m’entendez ? ». on avait un peu la chair de poule.

Au bout de cette éblouissante et initiale ligne droite, de telle lampée de mots redoutablement appariés, et recrachés, et relancés, Marcon Crusoé dit Robinson André expirait-inspirait l’espace sensible d’un fragment de silence et invitait « Venez vous qui n’ êtes pas d’ici. Entrez enfants doués d’obscurité vous qui vous savez nés de l’obscurité venez assistons ensemble à la levée du trou Car le théâtre n’est sur scène que la représentation d ’un trou. Voilà l’idée à creuser. Voilà l’idée que Louis de Funés voulait creuser pour moi. » Et Marcon André s’envolait, « danseur fulgurant ».

Chapitre Il. L’abasourdissement avait été tellement partagé que le Festival 1986 fut vraiment comme une année Novarina, avec le Monologue d’Aldramalech. Marcon enfonçait à jamais le clou. Présenter encore l’auteur. et son double comédien, dans un journal qui a su publier. du premier. des inédits, et, du second, quelques propos indispensables ? Redire le spectaculaire Discours aux animaux prononcé en 1987, et repris ensuite ? Comme inépuisable.

Chapitre III. Suite et recommencement. Avignon. Mil neuf cent quatre vingt-onze. L’inquiétude, soit, aux Pénitents blancs, sous ce titre plein et rond et dense, la suite, une « seconde partie » entre cent possibles du même Discours aux animaux. Novarina. qui vient de publier un recueil de ses réflexions sur le théâtre (1),joue les impassibles, mais probablement qu’au fond de sa personne, il doit être bouleversé. « Entrée de l’homme pour la deuxième fois. A lors je me suis assis et l’ai dit aux pierres : l’action est maudite ».

Transmué en habitant sombre des îles Rangeadéblavardégladines, « au mois de Sequane en trente et un avant longtemps », Marcon revenant habillé d’un manteau pareil à celui que Glenn Gould, ce frileux maladif, ne quittait pas, Marcon reprend l’histoire qui lui traverse le corps, le fulgure à la façon d’une foudre, d’un électrochoc, le possède et nous rive pantois. éperdus. Nous pulvérise. ll dit : « c’était du temps où on entendait encore parler (les anciens vieux qui avaient vu d’anciens jeunes avoir entendu parler de gens qui avaient prétendu pas être là » Son visage est pâle, le visage défait de mort qu’est celui de l’acteur sur lequel le verbe de Novarina, « comme un vieil alcool longtemps bouché va avoir des effets spectaculaires ». Et de tout son corps, d’un souffle, il s’immerge, à moins qu’il n’émerge, noyé en sursis, sur ce plateau religieux que seule peuple une énorme pierre.

Le plus lourd décor d’Avignon : un caillou muet d’une tonne et plus. Ce rocher de Sisyphe, à moins que de Prométhée. Mis en scène, ce rocher, par Mark Blezinger, le premier en dehors de l’auteur des splendeurs Novarina à régler le rituel solitaire d’exorcisme et d’action de grâces auquel Crusoé Marcon s’amarre plus fortement que jamais. Comme si aujourd’hui, en ce mois de juillet mil neuf cent quatre-vingt-onze, il avait tout vécu, jusqu’au bout du plus fragile de ses neurones aux aguets, tout senti de cette lave qui le parcourt et jaillit de ses poumons musiciens : la langue de Novarina, cet océan à perpétuité. Pire que jamais. C’est-à-dire encore plus belle. Regardez le petit sourire qui flotte, par fractions d’instants, sur les lèvres du récitant. Ce sourire d’au-delà ce ceux qui ont vu, On évoquait Glenn Gould, à cause du pardessus de laine, en pleine et pire canicule, Le pianiste, au bout des années, jouait autrement, plus lentement, ses fétiches Variations Goldberg. Interprétant son Novanina, partition in progress, Marcon, chaque fois plus maître de son être, de la même façon chaque fois plus seul, saurait faire frémir les cailloux. Délivré de l’angoisse. Né à l’inquiétude.

Mathilde LA BARDONNIE

(1) Pendant la matière, Valère Novarina, édition POL.

L’inquiétude, seconde partie du Discours aux animaux, chapelle des Pénitents blancs, jusqu’au 17juillet 1991

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Le Monde le 16 juillet 1991
Criez, silence
Article écrit par Michel Cournot
Novarina est. une rareté : un poète.
Et il a trouvé son interprète, André Marcon. C’est « l’inquiétude »

« Quelqu‘un entre. Qui es-tu ? Si le soir tombe, reste avec moi. Et vous, qui êtes-vous, gens d’ici ?... Hier la France a connu un défilé. C’est tout pour aujourd’hui, le platane a assez souffertt ».

Quelqu’un entre. Où ça ? Il y a là juste une pierre, grosse un peu comme un taureau, grise, couchée par terre. Un peu plus loin derrière c’est le mur, les maçons ont dû le mettre debout voici au moins deux ou trois siècles, il a des trous, de petits cratères, comme ceux que font les canons des tanks, mais ce mur n’est pas « voulu », pas exprès, il était là c’est tout, non il ne faut voir que cette massive roche grise, qui reste couchée au nez des gens comme dans les forêts, les montagnes, on la dirait enceinte, presque, ce qui frappe c’est qu’elle se tait, cette pierre, quand bien même elle dit tant de choses, mais quoi ?

Est-elle fâchée ? Nous fait-elle la tête ? Ou au contraire rêve-t-elle à demi, pas loin d’une béatitude ? Il faudrait savoir depuis quand elle s’est tue, pourquoi. A présent, là devant, ce n’est que cette pierre, ce mur là sans être là, le silence. Ah oui, enfin le silence ! Requiem tremblé de myriades de voix en allées, ou à peine qui s’étaient éle­vées, ou tuées. Et quelqu’un entre.

« Sept ans j’ai cru mon corps être un jour sans objet et un jeu de rien ». Que dit-il ? Qui est-il ? Il a un crâne fort de manoeuvre, de garçon de ferme ou d’hôpital, des mains d’étrangleur sans savoir (comme l’auteur du Bateau ivre), il est tout rouge forcément puisqu’il a mis un gros manteau dans ici qui n’est qu’une fournaise (tous en chemise nous sommes en nage), et c’est à se demander s’il faut jamais en croire ses yeux, ses souvenirs, ses comparaisons, parce que ce quelqu’un, mais alors là de toute évidence, il est un ange. Ange ici élu entre tous les anges. Ni acteur comme tout autre, ni citoyen comme tout autre mais ange, mirage, innocence, — et sur quoi marche-t-il, se pose-t-il, on ne voit pas, et ses yeux sont des reflets de jour, et les paroles qui naissent, quelque part en avant de lui, c’est comme si lui-même ne les prononçait pas, comme si elles l’avaient traversé, comme s’il ne les avait pas lui-même entendues.

« J’avalavais tout à l’envers »

Et ces paroles, qui les aurait écrites ? Elles ont des trous d’air, des genoux qui flanchent, des pas de danse imaginaires comme ceux dont la tête a subi un choc par le bistouri ou par l’EDF, paroles qui ne s’imposent pas, qui ne « visent » pas, mais, c’est l’inverse, qui tombent comme une eau d’été et qui volent aussi vives que la poussière des champs, et qui s’en vont se perdre. « J’ai dû tout vivre par le trou gauche, j’avalavais tout à l’envers, j’inversais tous les mots et j’expirais tout dans l’autre sens. »

Ce qui nous tombe là s’appelle l’Inquiétude. L’ange du bleu, le non-coupable, qui laisse les voix le traverser sans leur écorner un cil, c est André Marcon. La roche grise qui, elle, retient toutes les voix et les transmue en silence, c’est l’éternité des plissements, hercy­niens ou autres, passons. Tous les animaux du monde qui se taisent, à l’exemple de la pierre, ils sont cachés tout autour, dans les buissons courts mais feuillus (car les éléphants ont mangé les arbres). Pour les animaux l’homme est une rareté et surtout une déception, puisque, des éternités durant, il était resté muet, comme eux, muet ou presque. Et l’absent, le manie-tout du huitième ou dixième jour, le créateur, c’est Valère Novarina il est cette aberration d’être ce que l’on appelle un poète, il n’y en a jamais plus d’un, ou deux, à peine plus, par chaque temps qui ait jamais passé. Et certes pour faire un monde il faut de tout, et de beaucoup de rien, si bien qu’à côté d’un Novarina, cette aberration, tout le reste du jour (comme on dit oeufs du jour) est plus ou moins du machinal, de l’usuel.

« Pourquoi l’espace est-il en quatre ? Pourquoi le mort dit-on qu’il sort ? Pourquoi les bêtes dit-on q u’elles passent ? Pourquoi les hommes sont-ils en vrai ? Pourquoi entrer avant de partir ? », écoute l’ange sans oser rien accrocher, au passage - Et Novarina, dans ses dents « Au théâtre, on pourrait presque voir la naissance du monde. »

MICHEL COURNOT

Pénitents blancs. Jusqu’au 17 juillet, à 21 h 30

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Texte paru dans l’ENCYCLOPAEDIA UNIVERSALIS
de André GUNTHERTet Jean-Loup RIVIÈRE

Le Discours aux animaux
Valère Novarina

Auteur dramatique, Valère Novarina occupe, sur la scène contemporaine de l’écriture théâtrale, une place originale. Son oeuvre, soutenue par un rapport problématique de la langue et du corps, explore depuis ses débuts (L ’Atelier volant, 1971), sous forme de « pièces » pour le théâtre ou de « discours » qui ont été également interprétés sur scène, les limites et la possibilité de l’expression dramatique. Avec Le Discours aux animaux, représenté en 1986 au festival d’Avignon avant d’être joué aux Bouffes du Nord, l’édition en 1984 du Drame de la vie (POL.), et, en 1986, du Pour Louis de Funès (Actes Sud), la période récente semble marquer la reconnaissance d’une recherche ou, pour mieux dire, d’une obstination, demeurée longtemps peu connue du grand public.

Le paradoxe fondateur de l’écriture de Novarina pourrait se formuler ainsi comment imaginer une langue et construire un dispositif qui puisse chanter l’oralité sans la recouvrir par du récit, comment une poétique du vide peut-elle échapper au remplissage, comment mettre des mots dans une bouche sans l’obturer ? « J’ai pas écrit ça avec la main ou avec la tête ou avec la queue, mais avec tous les trous du corps. [...] C’est du texte à trou d’air, à appel d’air, féminin, vide, oral, ouvert, creux, ça appelle l’acteur au secours » (Lettre aux acteurs précédé de Pour Louis de Funès). Un tel projet passera d’abord par une « sacralisation" de l’acteur, gardien de son corps troué, héraut de son destin d’être parlant. Pour Valère Novarina, l’acteur, dans l’apparition physique de son corps sur scène, est d’abord « animal », et la déclinaison produite dans Le Discours aux animaux (« animaux", « omnimaux", « umnimains », « animots ») le révèle de façon ludique. L’acteur sur scène est ensuite le proférateur de la parole, matière du vide, colonne d’air sectionnée par la bouche d’où sortira une n parle » elle aussi profondément corporelle (« rires, pets, ho­quets, salivations, respirations, toutes les scories qui marquent la nature animale, matérielle de c’te parole qui sort du corps à l’homme », Lettre aux acteurs). Appuyée sur cette forme de fascination pour l’épiphanie de l’acteur qui la place dans la descendance d’Artaud, l’écriture de Novarina rêve, par la « mise en rythme" d’un lexique original (quasiment un idiolecte), d’être quelque chose comme la description musicale d’une planche anatomique.

Sur une scène idéale qui serait au fond la bouche, il s’agit de maintenir du vide, l’appel d’air du trou originel. Ainsi, délaissant les repères traditionnels de l’action dramatique ou de la psychologie, l’’oeuvre de Novarina isole les mouvements élémentaires du théâtre et de l’écriture. Derrière la richesse et la complexité sonore de la langue, apparaît une sorte de minimalisme quel est le « minimum" nécessaire pour qu’il y ait du théâtre ? Se refusant à la production d’image, de narration, de spectacle, elle établit les repères de son utopie par le travail de schèmes infrastructuraux (nomination, génération, répétition), de motifs récurrents (la bouche, le ventre, la naissance, la mort...), d’actes initiaux et élémentaires (entrer, sortir, nommer).

La nomination constitue en effet le matériau essentiel - matériau de l’action, matériau de la langue. Nommer, dire son nom, dire son action autant d’actes verbaux bruts produits par l’acteur qui viennent former l’action dramatique comme pur réseau de matière langagière. Le travail sur le nom - dont la Bible, livre de la nomination, livre de la naissance des choses, fournit l’exemple fondateur - est sans doute l’aspect le plus frappant de la dramaturgie novarinienne. Ainsi, le Drame de la vie, fantasme ironique de la constitution d’une Bible laïque (la pièce dénombre 2 587 personnages, soit plus que dans la Bible), accumule de longues successions de noms propres, inventés ou non (Latrin, Dorcet, Urbain, Lorime, Antor, Orbier, Langin, Sa­bord...), de dénominations fabriquées à partir d’éléments discrets indéfiniment repris : l’Homme de..., l’Enfant de..., le Docteur... (L’Homme de Lambi, l’Homme de Pontagre, les Hommes de l’équipe logique ; l’Enfant Sézée, l’Enfant Machu, l’Enfant de Tio ; Docteur Sacrim, Docteur Autrou, le Docteur de vérité...), de noms de lieux, de dates, de chiffres, ou de variations sur ie prénom minimal Jean (Jean Trou Verbier, Jean Séra­phique, Jean Sapien, Jean Rien-qui-vient...). Une combinatoire infinie, alliée au « bougé »toujours possible du nom (l’Enfant Achu devient l’Enfant Machu, l’Enfant Machulet...), engendre une constellation nominale, sorte de tourbillon d’énergie pure, où l’acte d’écriture est pour ainsi dire rendu visible.

La jouissance quasi physique du travail sur la matière du langage le démontre à l’inverse des tentatives de déconstruction de la langue, la recherche de Novarina offre l’exemple d’un remarquable travail sur le français. Par le jeu des litanies nominales, par le choix des formes et des sons, par l’emploi d’un registre tenant volontiers du « bas » rabelaisien (« À la tribune, les trois fous servent à manger aux officiels. Comme premier plat, ils leur servent du derrière », Le Drame de la vie), elle se rattache à cette veine d’écriture qui puise dans le vivier du français traditionnel pour inventer une langue à la fois neuve et familière.

Disparition des images, effacement des bribes narratives, rêve fanatique d’un théâtre sans médiation il est clair que l’oeuvre de Novarina occupe un point limite, à la frontière de la fondation et de l’impossible du théâtre. L’actuelle reconnaissance de son travail amènera-t-elle Novarina à s’engager sur d’autres voies ? Il fait partie de la logique constitutive des formes extrêmes qu’on ne puisse absolument pas dire si celles-ci ont un avenir - cela même n’est pas étranger à la tentative de Novarina.

André GUNTHERTet Jean-Loup RIVIÈRE